Proposition simple, presque évidente, mais dont la mise en oeuvre est infiniment plus complexe. Car une commune nʼest pas tout dʼun bloc, elle présente une infinie palette de personnalités, de sensibilités, de contradictions, dʼhistoires individuelles et ne conscience collective bien arrimée et sédimentée.
Le contrat fondateur ( matériel et moral) scellé en 1975 - la mairie fournit lʼencre et le papier , ainsi que les informations municipales et lʼéquipe de publication de la Maison des Jeunes a la pleine responsabilité de la publication - a traversé le temps et il nʼest pas pour rien dans la fécondité et la longévité de lʼaventure.
Car si des tensions ont surgi de temps à autre - toute municipalité a le désir légitime de baliser son champ dʼaction que ne lui a jamais toutefois disputé le Trait dʼUnion - les uns et les autres se sont accordés pour que “ le village de lʼécriture “ poursuive sa route.
Car une vie communale bien équilibrée doit éviter prioritairement toute confusion des fonctions, des genres, des engagements, source de blocages stériles. Si une municipalité sʼappuie sur la légitimité du suffrage universel, les associations tirent la leur de leur seule action. Dès lʼinstant ou cette clarification est dans les têtes, elle le devient automatiquement dans la réalité. Chacun peut ainsi se consacrer pleinement à sa tâche et le village tout entier y gagne en sérénité et en saine émulation.
Le Trait dʼUnion est ainsi lʼinstrument de la reconnaissance mutuelle de tous les acteurs, il invite tout le monde à travailler avec tout le monde dans la bienfaisante complémentarité et créativité des hommes et des actions qui font une commune.
Le Trait dʼUnion nʼest pas un discours sur la pluralité ( qui nʼengage à rien) mais une pratique de la pluralité (qui est à la fois un combat et une conquête morale).
Celle dʼune communauté humaine dans laquelle chaque habitant est lui même et a sa part de vérité. Sʼil est illusoire voire inapproprié de croire que lʼon peut tout dire, cʼest un danger mortel que de cultiver un unanimisme de façade et une opacité qui verrouille la parole publique et désagrège la conscience collective.
Cʼest entre les deux que se joue - dans un subtil et fragile équilibre - toute lʼintelligence des relations humaines . En adhérant à la démarche de partage du journal - quʼils ont façonné au fil des années - les larrazettois ont choisi de faire vivre un village qui sait assumer ses contradictions en mettant chaque chose à sa place.
Ce quʼAlfred Bessou a résumé avec beaucoup dʼà-propos
“ le Trait dʼUnion doit faire ressortir un peu de vérité”.
Nous avons appris que lʼesprit partisan ( qui emprisonne et aveugle) nʼa rien à voir avec les parti pris ( qui sont le ferment de toute pensée et de toute action). Cʼest parce que lʼon défend un projet ou une vision que lʼon est conduit à mieux accepter et entrer en sympathie avec ceux des autres;
La force du trait dʼUnion est dʼavoir conquis la liberté de parole pour tous (ce qui nʼa rien de naturel ) et surtout dʼavoir construit la culture dʼune parole que lʼon échange (dans laquelle le désir et la confiance sont bien plus déterminants que la difficulté ou la facilité supposées dʼécrire).
Le Trait dʼUnion est bien “ le miroir du village” dans lequel on apprend sans arrêt de lʼautre et qui nʼexclue personne “ dans une neutralité de caractère pédagogique”.
La finalité première du Trait dʼUnion est dʼinventer en permanence la commune.
Dans le village fragmenté et volatile dʼaujourdʼhui, chaque numéro contribue à retisser les fils de la trame et de la conscience communale. Le journal est un arrêt sur images qui offre chaque trimestre la même grille de lecture du mouvement de la commune.
Chacun peut ainsi toucher du doigt où en est le village réel, ce qui se fait et se défait sous ses yeux. Sans quoi les fractures, les décalages, les perceptions se creusent au risque, pour les uns et les autres; de ne plus parler le même langage voire de ne plus participer du même horizon commun.
Félix Castan a probablement mis la barre un peu haut et bousculé les déterministes en affirmant que
“ sans le Trait dʼUnion, lʼidentité de Larrazet nʼexiste pas”
mais il a acté que le journal est bien le moteur, lʼindispensable fédérateur de la vie communale.
Sans sa médiation, il faudrait se résigner à ce quʼune une grande partie de la population vive les pieds à Larrazet mais la tête ailleurs. Ce dʼautant que le journal enregistre en permanence lʼarrivée sur le devant de la scène de nouvelles réalités, de nouvelles interrogations, de nouvelles têtes. il éclaire et accompagne les initiatives de la population car sa vocation première est civique et pédagogique.
Le Trait dʼUnion est une scène ouverte à tous les possibles et un acte
libérateur de lʼidentité en marche.